J’aurais aimé titrer ce blog «La Vérité toute cruelle» mais la Vérité n’a rien de cruel. Elle est juste difficile à entendre tant elle dérange. Au procès de Jésus, Pilate lui avait bien demandé : «Qu’est-ce que la Vérité?» Plus de deux milles ans plus tard, on est encore à tenter de la définir. On sait qu’en théorie, c’est une notion intellectuelle afin de mieux comprendre autrement. La véritable vérité est comme un sel fin qui glisse entre nos doigts. Dès qu’on pense comprendre, on est confronté à des événements qui remettent tout en question.
J’ai demandé à un confrère prêtre, chevronné en formateur qu’il a été, de m’accompagner dans une démarche de discernement vocationnel. Je ne remets pas mon sacerdoce en question. Mais il me manque de ne pas avoir un ministère ajusté à mon charisme baptismal. Je suis heureux comme thérapeute à la maison de réhabilitation qui m’a engagé et je suis heureux comme prêtre pour célébrer la foi des baptisés autour des rites religieux. Mais je ne peux pas conjuguer ces deux aspects fondamentaux de mon être pour ma propre santé mentale. J’ai besoin de mes congés pour me reposer des expériences cruelles dont je suis témoin à tous les jours. Par contre, c’est seulement dans ces moments que je suis disponible pour exercer mon ministère sacerdotal. Cette semaine, une cliente m’a questionné sur l’alliance que je porte au doigt. J’ai répondu que je suis marié. Quand elle a demandé qui était ma femme, j’ai répondu spontanément, l’Église. Je me sens endeuillé de cette Épouse à qui j’ai engagé mon avenir pour le meilleur et pour le pire.
Faut-il qu’il en soit ainsi? C’est la question qu’il me faut discerner. On s’émeut des moindres mouvements du pape au Vatican, mais on n’entend plus le message de nos évêques qui sont nos premiers pasteurs. Le bon Peuple de Dieu n’a pas encore intégré le dynamisme que voulait insuffler le Concile commencé par le pape Jean XXIII et terminé par le pape Paul VI. Pour ce Peuple devenu itinérant dans sa manière de croire, l’Église est encore à Rome, loin de la réalité de nos cours-arrières. Je ne blâme nullement les évêques qui ne peuvent plus engagé mes services de prêtre ordonné. Le Peuple qui leur est confié n’est tout simplement pas synchronisé à leur fréquence radio. Qui a entendu la position des évêques du Québec sur l’aide médicale à mourir ou la réaction de la Conférence des Évêques Catholiques du Canada sur le projet de loi proposée du gouvernement fédéral qui va dans le même sens?
Je ne renierai jamais ma foi, ni en Dieu ni à Son Église. J’ai juste besoin de la resituer pour mieux la vivre, quitte à me priver de la célébrer en public comme j’aimerais tant le faire plus souvent. Pour ceux à qui je manque pour présider leurs rassemblements de foi, sachez que vous me manquez tout autant. Sachez aussi que je suis très heureux auprès de ces gens qui ne peuvent plus cacher leur mal de vivre et qui veulent se relever après une chute, quand ce n’est pas une énième rechute, qui pourrait leur être de plus en plus fatale. C’est une triste maladie où le «mal a dit» sans toutefois avoir eu le dernier mot. Je ne suis pas triste pour autant. J’ai toujours la joie de vivre et de croire au-delà de toute espérance. Je communique mon message avec le même sens de l'humour que vous me connaissez. Je me sens comme ces femmes silencieuses au pied de la croix de Celui qui a aimé jusqu’au dernier souffle. Elles se savaient porteuses de vie, mais comment l’engendrer dans de tels événements? C’est ce que je tente de discerner avec l’aide de Dieu et le soutien de mon accompagnateur spirituel.